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Pierre-Michel veut... (suite)

9 années en prison, c’est la pire et la meilleure chose qui me soit arrivée ! J’avais atteint le fond du baril. Dès que j’ai mis le pied en-dedans, j’ai décidé de changer, de comprendre ce qui m’a amené là. J’ai commencé par lire des témoignages de grands criminels qui ont changé leur vie. Ils m’ont donné de l’espoir! J’ai redécouvert le christianisme et durant mes 3 premières années de détention, j’ai étudié la bible avec passion! Mes professeurs d’enseignement biblique étaient alors mes seuls correspondants.

 

En même temps que j’explorais les textes de la Bible, j’ai aussi découvert mes racines et ma culture Cri grâce aux aînés autochtones qui nous visitaient régulièrement. Les aînés m’ont guidé dans le parcours de mon histoire. Ils m’ont permis de comprendre les traumatismes intergénérationnels, l’histoire de ma nation et à quel point cette « histoire crochie » a affecté la réalité de ma famille et la mienne.

 

Grâce aux aînés autochtones, aux aumôniers à mes professeurs d’enseignement biblique, je me suis ouvert de plus en plus, j’ai renouvelé mon baptême et j’ai appris à écrire.

 

J’ai suivi avec succès 14 cours en psychologie et en sociologie au CEGEP. Je suis devenu éduqué et plus sensible à mes émotions parce que je ne me droguais plus. Quand tu te gèles à 13 - 14 ans, tu retardes tout le processus d’apprentissage. Tu deviens insensible à tes émotions et à celles des autres. Il n’y a plus rien de réel. Tu es toujours dans la fausseté. Quand j’ai arrêté la drogue, les choses ont pris plus de sens, je suis devenu comme une éponge. J’apprenais tout. J’étais gourmand d’apprendre.

 

Puis, en prison à mon tour, j’ai aidé d’autres autochtones. Je suis devenu la liaison entre les autochtones et le département de la santé de la prison ainsi qu’avec les autorités carcérales.

 

Lorsqu’on m’a annoncé que je sortais, je n’avais aucun endroit où aller. En prison, on ne te prépare pas à retourner dans cette société qui a changé énormément depuis que tu es en dedans. Je ne savais pas comment ouvrir un compte de banque, où loger, comment prendre le métro, comment m’abonner au téléphone, ni même comment faire l’épicerie. Imaginez ce que j’avais l’air avec la technologie ! Ça faisait 30 ans que je n’étais pas venu à Montréal. J’avais la chienne. Je ne savais même pas comment m’orienter dans la ville.

 

Perdu, j’ai contacté Laurent Champagne à l’Aumônerie et un gars de l’Aumônerie est venu me ramasser à ma sortie de Kingston. Il m’a amené à la résidence de l’Aumônerie à Montréal. J’avais un foyer !

 

Mais il me fallait aussi une job. Je suis sorti en avril, en pleine pandémie de COVID-19 ! J’ai écrit mon CV en français et en anglais.  J’ai appliqué pour 3 jobs. J’ai été chanceux. La Ville de Montréal et le gouvernement du Québec lançaient de nouveaux projets pour s’occuper des autochtones qui sont sans abri.

 

Je travaille donc pour Projet Autochtone Québec et Hébergement-PAC 2 qui fournit des abris d’urgence aux autochtones en itinérance. Comme travailleur de rue, j’aide les autochtones sans abris du Plateau Mont-Royal pris comme de l’ai été dans la souffrance du cycle de la drogue et de l’alcool. J’aborde ce travail avec beaucoup d’humilité et d’écoute. Je suis content de voir que le vécu d’une personne peut en aider une autre. Je suis capable de faire une différence grâce au dialogue avec les personnes que j’aide. Ça me garde humble parce que je me dis toujours que c’est sûr que ce pourrait être moi. Je veux être une voix pour elles et pour eux. Aider les autres, c’est l’essence de mon peuple, du christianisme et de l’humanité !

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